Toréadors

de Jean-Marie PIEMME



THÉÂTRE LE PUBLIC

1999

 

Interprétation Pietro Pizzuti (Momo), Alexandre Von Sivers (Ferdinand).

Décor et costumes  

Vincent Lemaire

Maquillages

Jean-Pierre Finotto

Lumières et mise en scène  

Philippe Sireuil

Production

THÉÂTRE LE PUBLIC





 
 






Il s’agit d’une rencontre entre deux hommes.

D’un côté Momo, respectable gérant d’une petite wasserette, émigré venu du sud et parfaitement intégré –du moins le clame-t-il haut et fort, avec la faconde propre aux accents de la Méditerranée – dans notre joli royaume. De l’autre Ferdinand, fils de la blanche et lointaine Russie d’avant le cataclysme du début du siècle, cadre d’entreprise aujourd’hui, désintégré par les lois du marché - du moins le prétend-il haut et fort, avec l’impertinence propre aux aristocrates décatis - et sans domicile fixe.

Entre ces deux comme point de départ, un pantalon usé et taché au fessier par le cornet de frites d’un enfant impertinent, et l’occasion pour le premier susnommé de montrer son savoir-faire et son "savoir causer », et pour le second, celle de lui montrer qu’il a plus que du répondant.

C’est que nos deux compères, nos deux bouffons des temps modernes, outre l’estampillage de leur identité, partagent également un autre plaisir : celui du débat, de la tchatche, comme on dit.

Vous dites : Yen et mondialisation, gendarmerie, larcin et vieille dame, justice et grand de ce monde, haut et bas, dopage, patron exploiteur ou être asocial, auto-amnistie et dysfonctionnement, et les voilà partis ; volubiles, tantôt aériens, tantôt en piqué au ras des pâquerettes, contradictoires par goût sophistes par ambition, dialecticiens par habitude, roublards par essence, vitupérant joyeusement à qui mieux mieux sur l’état, la beauté et la déglingue du monde.

Il s’agit d’un duel qui emprunte à l’art de la tauromachie son clinquant, son sens de l’esquive, ses banderilles, son goût des paillettes et du sang, avec comme bouquet final la mise à mort d’une amitié naissante, où les lois du calcul égoïste meurtrissent mieux que l’épée. « Parfois pour survivre, on a besoin de la saleté des autres ». dans une wasserette, on s’en serait douté, sauf que voilà… Le plus à plaindre des deux n’est pas forcément celui qu’on croit.

A la manière d’un Diderot avec Le neveu de Rameau, ou d’un Brecht avec Dialogues d’exilés, Jean-Marie Piemme, avec Toréadors, redonne à l’exercice du dialogue sa salvatrice impertinence, si ce n’est qu’entre le fou et le sage, celui qui a tort et celui qui a raison, la limite est comme… Sans frontière ? pourrait-on dire. Les temps changent, pas vrai ? Il est variable, en tout cas, comme on dit chez nous.

Philippe Sireuil

 
  1. photos de Danielle Pierre ©

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