
2012
Interprétation

Costumes Catherine Somers
Assistantes à la mise en scène Morgane Choupay et Hélène Lacrosse
Décor, lumières et mise en scène
Philippe Sireuil

2012
Interprétation
Costumes Catherine Somers
Assistantes à la mise en scène Morgane Choupay et Hélène Lacrosse
Décor, lumières et mise en scène
Philippe Sireuil
photos de Zvonock ©
STORM CLOUDS OVER LONDON
La scène est à Londres.
La neige s’abat sur la Tamise,
manteau tempétueux et glacial étouffant les rumeurs
des humbles et les manigances des puissants.
Un homme agonise au palais,
un deuxième s’enlise dans les égouts,
un troisième terrorise dans les coulisses.
Edouard, Georges, Richard.
Entre cette trinité machiste qui restera
d’un bout à l’autre de la pièce invisible à nos yeux -,
piétinant la scène
entre les salons où se mire le pouvoir
et les entrepôts où s’égarent les progénitures chéries,
six reines :
Anne Warwick, Isabelle Warwick, Anne Dexter, la Reine Elisabeth, la Duchesse d’York, la Reine Marguerite,
soit quatre femmes échappées de Shakespeare
et de la généalogie des monarchies britanniques,
et deux nées de l’imagination
fertile et narquoise de Normand Chaurette.
Les voici devant nous,
offertes à la pâture de notre regard,
obsédées par la disparition qui les guette,
« monstres - ainsi que les définit l’auteur lui-même -
faillibles, amputés, d’une main,
d’une couronne, d’une joie, d’une chevelure ».
Elles sont là, - cris et grimaces,
plaintes et rugissements,
chuchotements et invectives,
générosités et violences,
maternités blessées, rêves et cauchemars -,
épouses, mères, sœurs, et filles,
qui attendent, se trompent, se déchirent,
errent, mentent, se mentent,
s’inventent des départs, s’humilient,
égarent des enfants, pleurent, maugréent,
se perdent, éructent, menacent,
tentant en vain d’infléchir une histoire
qu’elles ne contrôlent pas,
entre un passé dont elles ont été dépossédées
et un futur qui signera leur ultime effondrement.
Nous sommes en 1483,
mais il s’agit d’un temps outragé, dilaté,
qui conduit ces femmes jusqu’aux rives de notre siècle.
Point de reconstitution historique ici
-l’écriture traverse Shakespeare et l’histoire, l’absorbe et s’en détache -,
seulement l’exposition d’un monde imaginé
comme seul le poète
peut en faire éclore,
où une reine peut faire
un voyage de plusieurs mois
dans le cours d’une seule journée,
et une muette se mettre à parler,
dans une langue riche et charnue
qui mêle lyrisme et trivialité,
burlesque et pathétique.
Philippe SIREUIL,
Novembre 2010.
photos de Zvonock ©
Les reines
de Normand CHAURETTE